Les fureurs invisibles du coeur • John Boyne

J’avais repéré ce roman en anglais lorsqu’il était sorti sous le titre « The Heart’s Invisible Furies » il y a un an. J’ai déjà lu John Boyne avec son dernier roman jeunesse Le garçon au sommet de la montagne, et j’ai bien entendu d’autres romans de cet auteur dans ma bibliothèque, car il est à mes yeux une valeur sure en littérature. Ce livre m’intéressait car il a été souvent désigné comme son roman le plus ambitieux, et je voulais absolument le lire. Ma joie en apprenant sa publication en France le 22 août était donc immense. Un très grand merci aux éditions JC Lattès de m’avoir donné la chance de le découvrir au cours de cet été.

Résumé …

Cyril Avery n’est pas un vrai Avery et il ne le sera jamais – ou du moins, c’est ce que lui répètent ses parents adoptifs. Mais s’il n’est pas un vrai Avery, qui est-il ? Né d’une fille-mère bannie de la communauté rurale irlandaise où elle a grandi, devenu fils adoptif d’un couple dublinois aisé et excentrique par l’entremise d’une nonne rédemptoriste bossue, Cyril dérive dans la vie, avec pour seul et précaire ancrage son indéfectible amitié pour le jeune Julian Woodbead, un garçon infiniment plus fascinant et dangereux. Balloté par le destin et les coïncidences, Cyril passera toute sa vie à chercher qui il est et d’où il vient – et pendant près de trois quarts de siècle, il va se débattre dans la quête de son identité, de sa famille, de son pays et bien plus encore.

Mon avis …

Depuis qu’il n’a que quelques mois, Cyril sait que ses parents ne le sont pas. Il n’a d’ailleurs jamais été autorisé à les appeler « Papa » ou « Maman », et il a été mis au clair dès le départ qu’il n’était pas de la famille. Ils l’ont recueilli par charité chrétienne, mais il ne pourra jamais être un Avery. C’est cette enfance un peu atypique qu’il va vivre, dans une maison et au sein d’une famille desquelles il se sent forcément extérieur, et sans aucun doute différent.

Sans réussir à se l’expliquer, il y a quelque chose chez lui qui n’est pas tout à fait comme les autres, et qu’il va découvrir au fil des années. Cyril est attiré par les garçons, puis par les hommes. L’idée d’embrasser une fille, ou pire encore, de la toucher, comme cela obsède ses camarades, lui donne envie de vomir. Ce qui le fait fantasmer, ce sont les garçons. Mais nous sommes en Irlande, au milieu du siècle dernier et l’homosexualité est condamnée. Gravement. La communauté homosexuelle est pourchassée, humiliée, insultée, agressée. Lorsqu’il a l’âge de comprendre ce qu’il est et ce dont il a envie, Cyril va malheureusement réaliser qu’il ne peut pas être lui-même s’il veut rester accepté par ses pairs, et tout simplement s’il veut survivre.

« Nous haïssons ce qui nous effraie en nous-mêmes. »

Il y a beaucoup de sujets dans ce roman : l’homosexualité tout d’abord, partie intégrante de cette histoire, et sans doute celle qui m’a le plus bouleversée. Dans une société où l’on considérait qu’être attiré par une personne du même sexe était une maladie, une perversion, Cyril représente tous ces hommes et femmes qui ont dû mentir sur ce qu’ils étaient et refuser d’être heureux et épanouis pour satisfaire l’opinion générale et les bonnes moeurs. J’ai été révoltée par ce que ce livre raconte et qui, je n’en doute pas un seul instant, est extrêmement proche que ce que beaucoup de personnes doivent subir encore aujourd’hui. Le fait que nous sommes tous différents et que cela est une richesse est loin d’être acquis et mon coeur se brise de savoir que la nature humaine est encore atteinte par tant d’intolérance, de violence, de fermeture d’esprit.

Il y a aussi la question de l’identité et de la filiation, très forte et extrêmement bien traitée dans ce roman. A travers le personnage de la mère biologique de Cyril tout d’abord, victime elle aussi de la honte que l’on voulait lui faire porter, du fait qu’elle soit tombée enceinte hors mariage. Son personnage apparait au début du roman, puis laisse la place à son enfant, qui va devoir grandir avec ce manque et ces questions n’ayant jamais de réponse. Pourtant, elle reste présente, par des apparitions ponctuelles, comme pour l’accompagner, toujours. Elle apparait très peu dans le roman, et j’ai cependant été complètement bouleversée par les passages la concernant. C’est là encore la preuve de la force du roman. Le traitement extraordinaire de chacun des personnages. Nous suivons Cyril tout au long de sa vie, tous les sept ans, et c’est juste extraordinaire de lire un roman aussi ambitieux. Cela ne m’était, je crois, pas arrivé depuis No Home, de Yaa Gyasi. J’ai été époustouflée par la qualité et la complexité de ce texte. Sa puissance narrative est incroyable, et difficile à expliquer tant il faut lire le roman pour comprendre ses qualités. Ce roman a sans hésitation rejoint mes romans favoris, ceux que je n’oublierai jamais.

Pour résumer …

600 pages époustouflantes de beauté, d’injustice et d’émotions. Ce livre me poursuivra toujours tant il m’a touchée et éblouie. C’est un bijou absolu.

Ma note : ★★★★★★
(20/20)

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10 réflexions sur “Les fureurs invisibles du coeur • John Boyne

  1. C’est marrant, j’avais envie de découvrir le roman car j’avais adoré Le garçon au pyjama rayé mais le résumé ne me parlait pas donc j’avais abandonné l’idée de le lire. Et puis ton avis me redonne envie ! Affaire à suivre !

  2. Sans ta chronique, je ne me serais probablement jamais arrêtée sur cette histoire et cela aurait été la plus grande erreur de ma vie. C’était 600 pages intenses, d’ émotions, de colère, d’espoir, de révolte, d’injustice mais aussi d’amour. Une véritable pépite. Un roman qui restera toujours dans mon esprit.

    Un immense merci à toi pour cette découverte ❤ !

  3. J’avais beaucoup d’hésitations sur ce roman. Sujet revu et rebattu, etc….mais c’est le deuxième avis vraiment positif que je lis. Je me laisserais bien tenter finalement.

  4. Merci d’avoir attiré mon attention sur cet ouvrage, ce fut une belle découverte. Une habile construction pour un résultat coup de coeur 🙂 Je le recommande vivement en bibliothèque !!

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