Chanson douce • Leïla Slimani

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A force d’en entendre parler un peu partout, j’ai eu très envie de découvrir ce roman. Quand je l’ai reçu à la médiathèque, je n’ai donc pas hésité à l’emprunter et je l’ai commencé hier soir, sans savoir qu’il serait aujourd’hui couronné du Prix Goncourt.

Résumé …

Lorsque Myriam, mère de deux jeunes enfants, décide malgré les réticences de son mari de reprendre son activité au sein d’un cabinet d’avocats, le couple se met à la recherche d’une nounou. Après un casting sévère, ils engagent Louise, qui conquiert très vite l’affection des enfants et occupe progressivement une place centrale dans le foyer. Peu à peu le piège de la dépendance mutuelle va se refermer, jusqu’au drame.

Mon avis …

Je suis particulièrement heureuse que ce roman soit le Prix Goncourt 2016 car, pour une fois, j’ai l’impression que ce livre s’adresse à tous les lecteurs et qu’il saura même redonner goût à la lecture à beaucoup, pour la simple et bonne raison qu’il accroche le lecteur dès la première ligne. En lisant le titre, on entend résonner en nous une mélodie bien connue, de celle que l’on souffle aux enfants avant qu’ils s’endorment. Pourtant, la première phrase du roman, « Le bébé est mort » nous plonge dans une ambiance toute différente.

A mes yeux, ce roman est un véritable thriller psychologique dans lequel règne une tension de la première à la dernière ligne. De fait, il est quasiment impossible de poser ce roman une fois qu’on l’a commencé. Et c’est, je crois, le signe qu’un livre est réussi. J’ai, vous l’aurez compris, été conquise par cette lecture qui a su me captiver et qui me marquera bien longtemps. Leïla Slimani a choisi de placer l’horreur dans le quotidien, comme peut le faire Barbara Abel dans ses thrillers. En décortiquant un personnage a priori respectable voire banal, l’auteur nous fait comprendre que nous ne connaissons jamais réellement les personnes de notre entourage, et encore moins une nounou, embauchée en vitesse pour garder les enfants.

C’est parce que l’on se reconnaît tous dans les situations évoquées que ce livre nous frappe autant. Qui n’a pas engagé une femme pour garder ses enfants ? Pourtant, connaissons-nous vraiment cette personne à qui l’on confie nos enfants, notre maison ? L’auteur alterne les points de vue, nous permettant de mieux cerner Louise, cette nourrice complexe qui, par un besoin presque obsessionnel, prend en charge toutes les tâches domestiques au sein du foyer. Qui, peu à peu, devient indispensable, leur permet d’avoir un confort jamais acquis auparavant, leur permet d’aller travailler en toute tranquillité et de rentrer le soir sans se préoccuper du repas, du ménage, ou de tout ce qui peut gâcher le quotidien.

Ce couple s’habitue progressivement à la présence de Louise qui s’insinue de façon presque malsaine dans leur vie. Cette femme qui, pour eux, n’a pas d’existence en dehors de leur foyer. Qui elle-même ne vit plus que pour cette famille dont elle pense faire partie. C’est toute l’ambiguité de leur relation qui est mise en lumière par ce récit. Cette volonté viscérale de se rendre chaque jour essentielle à la vie des enfants, au confort des parents, à la tenue de la maison. J’ai trouvé que l’auteur avait réussi avec beaucoup de justesse à analyser la relation très complexe entre les parents et la nounou. Elle révèle beaucoup d’aspects très intéressants de notre société, de ses inégalités sociales et économiques, et on referme le livre en ayant froid dans le dos, et en se demandant s’il nous sera un jour possible d’engager une nounou sans avoir ce livre à l’esprit.

Pour résumer …

Extrêmement bien écrit, Chanson douce est un thriller qui se lit d’une traite tant la tension est au maximum. Un roman dans lequel le quotidien et l’horreur se côtoient, et où l’auteur analyse avec une justesse glaçante notre société et ses inégalités. Une véritable réussite, et un Prix Goncourt mérité.

Ma note : ★★★★★☆
(17/20)

24 réflexions sur “Chanson douce • Leïla Slimani

  1. Avec tout ce qui se passe autour de ce livre et ton avis je vais certainement le lire, même si ce n’est pas trop mon genre de lecture, j’ai pas envie de mourrir inculte, merci pour ta chronique !

  2. J’ai vu qu’il avait reçu le prix Goncourt mais je ne m’étais pas plongé dessus plus que ça… Faut dire que cette édition ne m’attire pas des masses (manque de visuel, me faut un visuel ^^) mais ta chronique m’intrigue énormément. J’adore les thrillers psychologiques et je pense que je vais laisser une chance à celui-ci 😉

  3. Tellement heureux qu’il ait obtenu le Goncourt ! C’est vraiment mérité, ce roman est construit de main de maître ! Et c’est aussi un point de vue extrêmement acerbe sur les rapports complexes que peuvent entretenir deux catégories sociales si proches et si éloignées à la fois.

  4. Je n’ai pas l’habitude de lire les livres des grands prix littéraires. Ce sont souvent des lectures ennuyeuses, je trouve, qui se prennent pour ce qu’elles ne sont pas. Des lectures prétentieuses.
    Moi là, tu m’as bien tentée !

    Merci !

  5. Salut, je l’ai lu et j’ai beaucoup aimé. Merci pour ce billet et cet avis. Bizarrement comme tout le monde le décrit comme un roman glaçant je m’attendais à ce qu’il soit encore plus dur. Par contre je ne le classerai pas en thriller. Bon week-end à toi et à bientôt

  6. C’est toi qui m’as donné envie de le lire, je ne suis pas très thriller, mais je pense qu’il est différent et qu’il va me plaire. Pour moi le Goncourt ça ne veut rien trop dire normalement, mais je suis contente pour l’auteure !

  7. Je n’aurai pas fait ce choix pour le Goncourt, mais je ne suis pas membre du jury, ça tombe bien !
    Je n’ai pas accroché avec ce roman, je l’ai en effet lu d’une traite, on se laisse happer par l’histoire, mais je n’ai pas trouvé l’intensité et l’émotion que je recherche dans la lecture. Un peu déçue !

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